lundi, octobre 29, 2007

« L'ethnobotanique au péril du gazon »
Un article de Pierre Lieutaghi pour la revue Terrain



« Les rapports de l'homme avec la nature sont infiniment plus importants que la forme de son crâne ou la couleur de sa peau pour expliquer son comportement et l'histoire sociale qu'elle traduit.

A.-G. Haudricourt, 1962.


Ça pourrait commencer par une histoire de pelouse, dans le parc d'une petite ville bretonne. On y court à la poursuite d'une balle, vers quatre ou cinq ans, et ça vous vaut la révélation –ponctuée de taloches– de l'ordre et de l'interdit extrafamiliaux.

Le simplisme psychanalytique irait bien jusqu'à prétendre que ce traumatisme mineur va amorcer, au tréfonds de la psyché, une carrière d'ethnobotaniste. On a lu pire. Mais on aurait aussi bien pu choisir, pour témoins végétaux liminaires, le muflier rouge ou la linaigrette. La pelouse, ici, est simplement un bon prétexte. Pour rappeler que, dans nos pays, le jardin à la française et ses boulingrins illustrent de façon grandiose une distance à l'égard du végétal bien antérieure à l'avènement de Lenôtre (fig. 1). Devenus éléments malléables d'un décor, privés des seules libertés auxquelles puissent prétendre les plantes –élaborer une forme propre et en peupler l'espace–, herbes et arbres cessent d'être des interlocuteurs possibles pour les sociétés : les esclaves n'ont pas de parole. De Versailles au pavillon de banlieue, les êtres vivants les plus présents dans notre regard sont tenus au même mutisme. Le gazon qui n'a pas le droit de grandir, définitivement interdit de printemps, prolonge au-dehors l'espace moquette du séjour. Seul en diffère l'entretien (combiné aspirateur-tondeuse à étudier). Côté living, pourtant, on élève volontiers un philodendron familier qui a le mérite de faire bon ménage avec le teckel et de ne pas lever, lui, la patte sur la carpette. Et, derrière la maison, voire à une seule largeur de dahlia du tapis d'herbe, la laitue et le poireau n'ont jamais été aussi prospères, témoignant de l'enracinement tenace des velléités potagères chez l'urbanisé tout autant que de l'efficacité des produits d'entretien dispensés par les garden-centers ; (où l'on doit rendre grâce à la récession). Domestique, le végétal ne se prêterait-il plus qu'au décorum ou à l'utilitaire ? »
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Pierre Lieutaghi, « L'ethnobotanique au péril du gazon », Terrain, Numéro 1 - Les savoirs naturalistes populaires (octobre 1983). Mis en ligne le 23 juillet 2007
Suite du texte : ici


vendredi, octobre 12, 2007

Pour participer à l’enquête régionale sur les invasions biologiques en Adour Garonne...

Espèces animales ou végétales, belles étrangères introduites volontairement ou accidentellement, ne sont pas sans risque pour les écosystèmes. Mais le danger « n’est ni inéluctable, ni simplement démontré pour bon nombre de cas d’invasions biologiques.»
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Dans un premier temps, une enquête. Son cadre est très précis : répertorier les espèces envahissantes des milieux aquatiques et humides du Sud-Ouest. Observer, identifier, localiser, pour mieux surveiller par la suite.
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Même cet irrésistible ragondin est concerné ? Oui. Je sais, ces petites dents rouges, cette façon de musarder près de l'onde... On le dirait sorti d'un livre pour enfants. À dessiner, mais à ne pas inviter de manière irréfléchie.
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À qui s'adresse l'enquête ? À tout public intéressé. Vous trouverez sur les pages d'Eco Lab toutes les indications nécessaires. Et même si vous ne souhaitez pas participer, lisez, découvrez. Des fiches très précises concernant chaque espèces vous sont proposées.
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Source :
Tela Botanica, Eco Lab
Le ragondin a été photographié par Pascal Dubois. Merci à lui d'offrir si généreusement ses images...

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jeudi, octobre 11, 2007

À Bordeaux, de très belles expositions botaniques
Du 28 septembre au 22 décembre

Le livre en son jardin

..Expositions, mais aussi conférences, Bordeaux célèbre « le tricentenaire de la naissance de deux grands naturalistes de l’époque des Lumières, Linné et Buffon. Cet anniversaire est l’occasion pour la bibliothèque de présenter les trésors de botanique de ses collections patrimoniales - manuscrits, estampes, imprimés, photographies - du Moyen Âge à nos jours. Manuscrits médiévaux ornés de délicats motifs végétaux, ouvrages savants des XVIe et XVIIe siècles illustrés de gravures sur bois, travaux de naturalistes contemporains de Linné, traités des jardins et somptueux albums du XIXe inventoriant les flores d’Amérique, de Russie ou de Chine, tous les ouvrages présentés racontent avec science et art les relations de l’homme et de la nature. Un cabinet de curiosités enrichit l’exposition qui s’ouvre à la création contemporaine avec les photographies d’Alain Beguerie, cueilleur d’images végétales, patient botaniste de l’ombre et de la lumière en quête de « l’esprit des plantes ». Conférences, ateliers et spectacles déclineront la botanique durant toute l’exposition, du mode savant au récital fantaisiste en passant par le plaisir d’herboriser et l’art de cultiver son jardin. » ...
Texte : Communiqué de la Bibliothèque municipale de Bordeaux
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Bibliothèque Mériadeck 85, cours du Maréchal Juin 33000 Bordeaux
Salle d’exposition niveau -1 Du lundi au vendredi de 13h à 19h. Le samedi de 13h à 18h Rens. 05.56.10.30.00/02
Entrée libre
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Source : Tela Botanica Documentation également disponible sur cette page
Une autre gravure ancienne (hors exposition) sur cette autre page
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dimanche, octobre 07, 2007

Rien que des belles plantes !

À Bordeaux Jusqu'au samedi 13 octobre 2007 Une exposition de planches de botanique : fleurs et fruits des collections patrimoniales à la bibliothèque Son Tay. Informations pratiques ici. Bordeaux célèbre le tricentenaire de la naissance de deux grands naturalistes de l’époque des Lumières, Linné et Buffon. À suivre... Source : Tela Botanica

Fructification d'un Camellia japonica

L'enveloppe des graines a pris avec le temps la forme d'un masque. La partie intérieure de l'enveloppe. La face extérieure dessine des courbes qui pourraient être reprises dans un motif floral. Dégradés de bruns et d'ocre.
C'est au moment où l'enveloppe s'ouvre qu'il faut recueillir la graine. Sans attendre qu'elle sèche. Pour la planter ? Oui. Impatients s'abstenir !
Une question aux botanistes : parle-t-on d'akène pour désigner la fructification du camélia ? Oui j'hésite... mais ne trouve pourtant pas d'autre mot.

jeudi, octobre 04, 2007

Free Burma

un lien
Ce n'est pas le pouvoir qui corrompt, mais la peur : la peur de perdre le pouvoir pour ceux qui l'exercent, et la peur des matraques pour ceux que le pouvoir opprime... Dans sa forme la plus insidieuse, la peur prend le masque du bon sens, voire de la sagesse, en condamnant comme insensés, imprudents, inefficaces ou inutiles les petits gestes quotidiens de courage qui aident à préserver respect de soi et dignité humaine. Un peuple assujetti à une loi de fer et conditionné par la crainte a bien du mal à se libérer des souillures débilitantes de la peur.
Mais aucune machinerie d’État, fût-elle la plus écrasante, ne peut empêcher le courage de resurgir encore et toujours, car la peur n'est pas l'état naturel de l'homme civilisé.
Aung San Suu Kyi (Se libérer de la peur - Editions des femmes)
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mardi, octobre 02, 2007

'Acaciosa', 'Jardin blanc' : quand le Jasmin est parfum

Pour Erika
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Deux parfums seulement pour une fleur si présente ? Oui. Deux interprétations d'une fragance qui porte en elle un monde. J'ai choisi deux textes d'un ouvrage que j'aime. L'auteur y parle avec une belle liberté de créations exceptionnelles ou remarquables. Enfin, le plus souvent. Car il sait se moquer, en passant, de senteurs au succés immérité.
Je me suis attachée à cette fleur. À la façon dont elle se distingue dans un parfum. Naturellement, on la retrouve, moins singulière, dans d'autres compositions.
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Acaciosa (Caron)
..... «Acaciosa fait partie des éblouissantes "figures obligées" florales qui donnent la mesure des grands compositeurs : ce magnifique jasmin illustre ce que le grand chic, l'accès à des matières premières privilégiées et un clacissisme parfait peuvent obtenir, même en terrain connu. Le jasmin, surtout s'il est proche de la fleur, donne souvent une note opaque et un peu rugeuse qui peut devenir entêtante. Acaciosa est plutôt un jasmin-thé qu'un jasmin-fleur, distillé et clarifié jusqu'à ce qu'il devienne aussi saturé qu'une décoction. Un grand parfum tenace et profond. »
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Création : 1929 (image : tel était son étui )
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Jardin Blanc (Maître Gantier et Parfumeur)
......« Si le jasmin d'Acaciosa était joué sur une flûte traversière en or, Jardin Blanc l'est sur une flûte de Pan, et l'on ne peut comprendre l'un sans l'autre. L'évolution civilisante d'un instrument et d'une essence florale vont souvent dans le même sens : réduction des harmoniques et des partielles "râpeuses", pas nécessairement en simplifiant la formule, mais en la hiérarchisant, en la subordonnant à un effet esthétique plus pur mais moins personnel. .....Or, l'illusion de la matière est souvent lié à de minuscules imperfections, à son "grain". Je ne sais pas si Jardin Blanc a été conçu par la technique dite des "fleurs vivantes", censée restituer le spectre olfactif complet d'une fleur, mais c'est un des rares "fleurs blanches" que je connaisse à procurer le chatouillis râpeux dans la gorge qui seul peut nous dire : "c'est une vraie fleur". »
Luca Turin ______________ .
34 Avenue Montaigne et 90 Rue du Faubourg Saint-Honoré
5 rue des Capucines et 84 bis rue de Grenelle
L'ouvrage de Luca Turin : Parfums le guide (Hermé, 1992).
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